
Depuis quelques années déjà, les matériaux biosourcés se sont invités dans nos bâtis. Pourquoi leur utilisation dans le secteur de la construction est-elle devenue une tendance de fond ? Quels en sont les usages ? Pourquoi ces matériaux sont-ils une promesse de durabilité ?
Cela ne nous aura pas échappé : depuis quelques années déjà les bâtiments en bois fleurissent ici et là. De la maison individuelle, en passant par l’école ou bien la résidence universitaire, aucun paysage architectural urbain n’échappe - ou presque - à la tendance de fond des matériaux biosourcés. Celle-ci consiste à utiliser tous les matériaux d’origine végétale ou animale comme le chanvre, le liège, la paille, le lin et bien sûr, le bois.
On les distingue des matériaux géosourcés qui sont inertes et souvent non transformés, comme la pierre ou la terre crue.
À un moment où le secteur du bâtiment explore plus que jamais de nouvelles ressources, les matériaux biosourcés sont la promesse d’une construction durable.
Pour bien comprendre cela, revenons à certains fondamentaux. Le développement de tout végétal est lié au phénomène bien connu de photosynthèse. Pour se développer, une plante absorbe du CO2 tout au long de sa vie. Elle contribue alors à diminuer le taux de carbone présent dans l’air. Quand les matériaux classiques comme le béton, ou l’acier auront un impact carbone, celui des matériaux biosourcés sera négatif.
Mais le béton n’a pas dit son dernier mot et présente de nombreux avantages notamment pour les infrastructures, fondations et ouvrages complexes. Il n’est pas question d’éliminer le béton donc, mais plutôt de penser des constructions où il sera complémentaire avec les matériaux biosourcés, devenus également indispensables.
Prenons l’exemple du bois avec notamment le panneau de bois massif contrecollé, le CLT.
Quand la grume et le tronc arrivent en scierie, ils sont désécorcés, coupés, sciés pour faire des lamelles. Ces lamelles sont ensuite collées en plusieurs couches, perpendiculaires entre elles pour le “cross-laminated-timber”, ce qui signifie le lamellé croisé. Il sert ensuite à obtenir des panneaux très solides sur le plan mécanique et qui seront utilisés pour les voiles et les planchers par exemple. Ces mêmes lamelles peuvent aussi servir pour le lamellé-collé ; qu’on utilise pour les poteaux, les poutres, les charpentes mais aussi des murs à ossature bois.
Les atouts de la construction bois sont bien nombreux : véritable piège à carbone, le bois est aussi particulièrement adapté à la construction hors site. Il permet de construire plus vite, en réduisant la pénibilité et les nuisances pour les riverains.
Mais le biosourcé dans la construction ne se résume pas qu’au bois. La paille par exemple peut s’utiliser en façade porteuse, mais plus couramment en façade non porteuse pour une isolation répartie dans une ossature bois. Cerise sur le gâteau : l’utilisation de ce matériau permet de valoriser un déchet issu de l’agriculture.
C’est d’ailleurs le cas sur un chantier pour le moins original, rue du Colonel Avia dans le 15ème arrondissement de Paris où les équipes de Bouygues-Bâtiment Ile-de-France ont réhabilité un immeuble de bureaux en une résidence étudiante de plus de 140 chambres.
Une réhabilitation lourde avec une isolation constituée de panneaux de bois remplis de bottes de paille compressées qui a remplacé l’éternelle laine de verre. Avec des murs de 45 cm de profondeur, la paille, issue qui plus est de Seine et Marne, permet une très bonne isolation thermique et phonique.
Quand on pense au chanvre, on pense à ce super-aliment aux nombreuses vertus, ou à cet ingrédient magique que l’on retrouve dans nos crèmes et autres produits cosmétiques. En construction, le chanvre aussi recèle des atouts. Comme la paille, son utilisation permet de valoriser un déchet car l’on utilise la chènevotte, cette partie souvent non utilisée de la plante. Le béton de chanvre peut servir au remplissage des murs à ossature bois.
Il ne faut pas se fier aux apparences, le béton de chanvre n’est pas constitué de ciment et c’est bien là tout son intérêt.
Mais ce n’est pas tout. Le chanvre peut servir d’enduit notamment dans la rénovation du bâti ancien, et, la laine de chanvre issue du défibrage d’isolant.
Souvent dissimulés au sein des bâtis, les matériaux biosourcés s’utilisent dans des endroits insoupçonnés : dans la peinture, les enduits, les cloisons ou bien encore dans les revêtements de sols, les chapes et les plinthes. En isolation, dans les façades, les combles et les planchers. En extérieur aussi, quand ils sont utilisés en menuiseries ou en bardage. Bref, l’exploration des matériaux biosourcés en construction n’a pas fini de nous surprendre.
À cet égard, un autre chantier emblématique. La reconstruction du collège Denis-Poisson de Pithiviers, dans le Loiret. Longtemps resté dans les cartons, la reconstruction de cet établissement accueillant près d’un millier d’élèves a finalement débuté et va donner naissance à deux collèges. Avec un challenge de taille : viser une performance énergétique élevée en privilégiant au maximum des matériaux biosourcés et locaux.
Le résultat est là. Des bâtiments en ossature bois, bardages en bois, soit isolés au chanvre, au lin et au coton ; soit isolés à la paille.
Le second établissement sera, lui, équipé d’un rez-de-chaussée en béton et d’un étage isolé en paille. Sans compter le gymnase en ossature bois, le restaurant scolaire et des ateliers.
Le biosourcé a de beaux jours devant lui et n’est pas réservé à l’artisanat : il stimule l’innovation et la R&D, les filières se structurent, se développent et s’industrialisent. Certains réseaux fédèrent les acteurs, la réglementation se développe et les règles professionnelles s’étendent en donnant un cadre à la construction biosourcée.
Surtout, la promesse de durabilité de ces constructions ne repose pas seulement sur leur faible impact carbone. Elles sont aussi gages de bien-être, de perspirance et de confort.
Nul n’en doute, le formidable potentiel des matériaux biosourcés dessine les contours des constructions de demain.