
Avant le hors-site, le BIM
Déambulation en ville. Vous levez les yeux et là, une grue descend du ciel une salle de bain préfabriquée qui va prendre sa place sur un chantier qui n’existait pas il y a encore cinq jours ?
Vous ne rêvez pas, bienvenue dans l’univers de la construction hors-site et modulaire. Mais avant cela, permettons-nous une parenthèse pour expliquer comment aujourd’hui 80 à 85 % des chantiers pourraient être réalisés en usine, comme l’indique le rapport du Think Tank Real Estech remis au gouvernement en 2021 sur l’industrialisation de la construction. L’arrivée des outils digitaux et particulièrement du BIM (Building Information Modeling) a bouleversé les méthodes de travail. Ce modèle ressemble à une maquette numérique collaborative qui passe entre les mains de plusieurs corps de métiers qui interviennent à leur tour pour modéliser l’ouvrage jusqu’à réception du chantier. C’est une façon de “construire avant de construire” selon la formule régulièrement consacrée pour comprendre l’approche couplée du BIM et du hors-site.
Industrialisation : standardisation ou uniformisation ?
Préfabriqués, prédécoupés, préquantifiés, les matériaux sont optimisés et les ressources rationalisées pour réduire les coûts, les pertes et les déchets : des atouts qui s’alignent parfaitement avec la réglementation RE2020 de plus en plus exigeante avec le secteur pour atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Mais bientôt, les plans seront-ils prédessinés aussi ? Une interrogation qui pourrait tourmenter les architectes inquiets de voir leur créativité bridée. Aucun surplus de matériau mais pas d’imagination au rabais non plus ! Mathieu Royo, directeur commercial adjoint en charge du projet UNIK pour Bouygues Construction vise plutôt l’amélioration en continu et l’amplification de l’expérience utilisateur grâce au BIM et la construction en usine. “La structure est standardisée mais les finitions sont personnalisées”. Autrement dit, c’est la standardisation des techniques qui est attendue et non l’uniformisation des territoires ni celle des programmes de construction. Avec 46 opérations pour le Ministère de Armées, 67 bâtiments à faire sortir de terre d’ici 2024 pour loger les troupes de l’Armée française et 5 000 éléments réalisés en modulaires 2D, le programme UNIK de Bouygues Construction bénéficie de la fluidité de l'exécution du BIM pour optimiser le suivi et l’assemblage de tous les éléments industrialisés, tout en conservant un accompagnement sur-mesure en fonction des territoires et des implantations géographiques.
Le hors-site pour la réhabilitation énergétique des logements
L’autre épineux sujet dans la course contre le réchauffement climatique concerne la réhabilitation énergétique et la rénovation lourde des bâtiments existants, plus que jamais dans le viseur des États. Pour répondre aux enjeux écologiques et lutter contre la précarité énergétique, il devient impératif de créer les conditions de la massification de la rénovation de ces logements. La construction hors-site sort une de fois plus ses atouts en offrant la possibilité de créer en usine de nouvelles façades plus isolantes aux dimensions et à la découpe ultra-précise pour venir les installer sur l’existant. Même constat pour les modules de chauffages et l’installation de panneaux photovoltaïques, aucune intervention n’est envisagée à l’intérieur des habitations, encore une fois des conditions souples avec une rapidité d'exécution à la clé. Cependant, ces opérations encore onéreuses nécessitent d’installer une dynamique sur la baisse des coûts. Avec un objectif de l'État, bien loin d’être atteint, de plus de 500 000 logements à rénover chaque année jusqu’en 2050, plus qu’une dynamique, c’est une accélération qui est attendue. La construction hors-site a dans cette perspective de beaux jours devant elle, pour transformer les logements et passoires thermiques d’aujourd’hui, en logements de demain, durables, écologiques et performants.