
Force est de constater que la crise de l’eau s’intensifie. 2,3 milliards de personnes vivent dans des pays en situation de stress hydrique et 3,9 milliards d’êtres humains souffriront du manque d’accès à l’eau en 2050. L’heure est grave, mais si on observe le vivant pour reproduire sa virtuosité, des solutions existent. Comment le biomimétisme répond au concept de ville-éponge et comment s’organise la perméabilité des espaces urbains ?
Poursuivons avec ces chiffres assommants mais indispensables pour comprendre la nécessité de trouver de nouveaux modèles pour une meilleure résilience de la ville face aux conditions climatiques de plus en plus rudes. Selon l’ONU, 80 % des eaux usées sont rejetées sans traitement dans l’environnement et 90 % des catastrophes naturelles sont induites par l’eau. Et pour encore mieux comprendre à quel point nos actions sont dépendantes les unes des autres : 72 % des prélèvements mondiaux d’eau douce sont réalisés par l’agriculture pour satisfaire une consommation en constante augmentation de denrées alimentaires, de fibres et de nourriture pour animaux.
Maintenant, place aux solutions !
L’enjeu pour les villes consiste à opérer un rééquilibrage entre les sols perméables et imperméables, c’est-à-dire en rendant aux surfaces leur porosité pour une meilleure infiltration des eaux. Vaste programme qui aurait pour vertu de pallier les risques d’érosion et d’inondation. Pour favoriser le cycle naturel de l’eau, il faut réaménager des zones humides au cœur des villes et recréer des écosystèmes pour contrecarrer l’artificialisation des sols. Végétaliser les espaces, créer des oasis et des lieux de récupération des eaux, favoriser l’infiltration plutôt que le ruissellement sont autant de défis qui attendent l’urbanisme dans les prochaines années. Comment transformer, aménager la ville pour affronter ces pluies torrentielles et passer ainsi de la ville-entonnoir à la ville éponge ?
Absorber, réutiliser, recycler les eaux, c’est le défi que s’est lancé la ville de Wuhan en Chine en 2016 avec son programme de ville éponge pour faire face à la dégradation des sols et aux multiples inondations qui paralysent la ville. L’enjeu est double : il faut à la fois savoir désengorger la ville en cas de catastrophe naturelle, et également s'approvisionner en eau lorsque les réservoirs naturels sont asséchés. Pour contrer la montée des eaux très impactante et inéluctable dans plusieurs pays d’Asie du sud-est, ces derniers servent de laboratoires à ciel ouvert pour recréer des systèmes biologiques proches de ceux des marécages. La ville est désormais aussi intelligente que perméable pour apparaître résiliente face au changement climatique. La question de la gestion de l'eau en France accélère en effet aussi chez nous la prise de décisions dans les collectivités qui souffrent de manière plus pressante du manque d’eau. La métropole du Grand Lyon pense ainsi la ville perméable sur plusieurs échelles : de la gestion à la source (valorisation des eaux pluviales) au Grand Cycle de l’eau (maîtrise du risque inondation), ainsi qu’à l’échelle du quartier (utilisation de matériaux poreux pour lutter contre les îlots de chaleur) et de la métropole (entretien des grands ouvrages publics). Pour que l’eau reste un bien commun, une denrée préservée parce que précieuse, les solutions inspirées par la nature permettront la restauration des écosystèmes endommagés.
Image : Manas Bhatia